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 Massacre des baleines en Antarctique - Décodeurs 360 | Décodeurs 360
Image d’un chasseur de baleines issue du film Au coeur de l’océan
Auteur de l’article
Parallèlement à son cursus universitaire en Sciences politiques et Relations internationales, Alexandra a renforcé sa rigueur analytique en travaillant pour le ministère des Armées. Passionnée par l’Océan, l’Orient et l’Histoire, elle s’évade au gré des expositions parisiennes et des livres chinés deçà-delà. Dès qu’elle le peut, elle voyage en quête de nouvelles cultures, de grands espaces et de sites de plongée insolites : autant de sources d’inspiration pour ses articles.
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Massacre des baleines en Antarctique


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L’Antarctique, ultime refuge pour les cétacés 

Les baleines comptent parmi les espèces les plus menacées par les activités humaines. Créée en 1946, l’International Whaling Commission (IWC), ou Commission baleinière internationale (CBI), institue les premiers quotas relatifs à la pêche à la baleine dans les années 1960. Cela conduit notamment l’Angleterre et les Pays-Bas à renoncer à la chasse, faute de rentabilité. Le moratoire de 1982 interdit la chasse à la baleine dite commerciale. Il est adopté par les trois quarts des membres de l’IWC. S’il vise à permettre le renouvellement des générations, et donc la préservation des différentes espèces de cétacés en danger, ce moratoire exclut la chasse aborigène de subsistance, autorisée au Groënland, en Sibérie, en Alaska et à Saint-Vincent-et-les-Grenadines. L’Antarctique fait en revanche partie des zones de refuge pour les mammifères marins.


 L’Antarctique est-il encore un sanctuaire pour les baleines ?

Pourquoi le Japon a-t-il été condamné ?

En quoi les baleines sont-elles vitales pour l’écosystème marin ?

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Parmi ceux qui regimbent figurent le Pérou, l’URSS, la Norvège et le Japon. Ce dernier retire toutefois son objection en 1985, pour finalement accepter le moratoire en 1987. Cependant, cette même année, le pays nippon lance un « programme de recherche scientifique » douteux visant les cétacés du sanctuaire austral. Le JARPA (Japanese Whale Research Program under Special Permit in the Antarctic) prévoit ainsi la capture de 300 baleines de Minke (ou rorquals de l’Antarctique) par an. Ce taux passe à 400 spécimens en 1994, puis à 850 avec le JARPA II, en 2005.

En 2012, le Japon fait pression sur l’IWC pour bloquer le projet de sanctuaire pour les baleines en Atlantique Sud, défendu par 38 pays. D’après Milko Schvartzman, responsable pour l’Amérique latine de la division Océans de Greenpeace, « Le Japon bloque le sanctuaire. Le Japon et quelques pays emmenés par le Japon, qui achète leur vote », à l’instar de « gouvernements comme ceux des Caraïbes et de quelques îles du Pacifique [qui ont] voté non alors qu’ils ne chassent pas la baleine ».

Les baleines, gardiennes des océans

Cette chasse à la baleine de grande ampleur inquiète d’autant plus les scientifiques que le danger qui pèse sur les cétacés représente un grand péril pour le milieu marin. Selon une étude menée par Joe Roman, biologiste à l’Université du Vermont (États-Unis), les baleines sont les « pompes de l’océan », dans la mesure où leurs allers-retours entre la surface et les profondeurs permettent de remonter en surface la matière organique issue des poissons englouties dans les abysses. À l’inverse, une fois mortes, les carcasses des baleines sombrent au fond des mers et nourrissent une kyrielle d’animaux nécrophages, dont se repaissent calmars et poissons. De par leurs grandes migrations d’un bout à l’autre du globe, les baleines assurent de surcroît la circulation des nutriments de manière horizontale, d’où l’expression de « tapis roulant baleinier », employée par Joe Roman.

Cette étude met également en exergue l’impact positif des baleines sur le changement climatique. À l’instar des gros poissons, celles-ci sont davantage résilientes¹ aux événements extérieurs. « Parce que ce sont des espèces qui vivent longtemps et n’ont des petits que peu souvent, les oscillations sont atténuées et le système entier est plus stable. », explique Joe Roman. Ne pas chasser les baleines permet de maintenir le carbone de leur carcasse dans les océans au lieu de le laisser emplir l’atmosphère.

Vers la fin de l’impunité ?

S’il a accepté le moratoire, le Japon a donc continué ses activités illicites au nom de la « chasse scientifique ». Sous couvert de la mise en place de « programmes de recherches » sur les animaux, il délivre des licences à ses pécheurs pour chasser les cétacés jusque dans leur sanctuaire austral. À cet égard, le pays du Soleil-Levant est réputé avoir tué plus de 10 000 baleines entre 1987 et 2009.

Créée par le Capitaine américain Paul Watson en 1977, la Sea Shepherd Conservation Society refuse cet état de fait. Elle n’a de cesse de poursuivre les baleiniers sur toutes les mers du globe afin d’empêcher les massacres. Selon Paul Watson, « en 2012 et 2013, les pêcheurs japonais sont rentrés chez eux avec seulement 10 % des prises prévues ». L’ONG a sauvé environ 6 000 baleines des harpons japonais, faisant perdre aux Nippons des dizaines de milliers de dollars. À travers ses reportages, notamment diffusés dans son show télévisé Whale Wars, la Sea Shepherd alerte l’opinion publique mondiale. À leur tour, des Australiens horrifiés ont filmé la capture et le dépeçage de ces animaux, sans défense face aux usines flottantes des pêcheurs nippons. Dans la foulée, l’Australie décide de saisir la Cour Internationale de Justice (CIJ).

Le 31 mars 2014, les 16 juges de la CIJ condamnent unanimement la mauvaise foi du pays nippon. D’après Patrick Ramage, directeur du programme Baleines de l’International Fund for Animal Welfare (IFAW), ce jugement « devrait augmenter la pression sur les autres campagnes de chasse à la baleine et les rendre plus difficiles à justifier. Ce sera le cas pour les campagnes que le Japon mène sur ses côtes et dans l’océan Pacifique Nord, mais aussi pour l’Islande, qui avance des raisons à la fois commerciales et scientifiques. »

Le porte-parole de la délégation japonaise accepte de se conformer à la décision de la CIJ – le pays peut difficilement en faire autrement compte tenu de la pression politique qui pèse sur lui. En outre, contrairement à ce que certains Japonais prétendent, la consommation de la chair des baleines n’a rien d’une tradition ancestrale. Cette pratique remonte en effet à la fin de la Seconde Guerre mondiale : ruiné, le Japon se met à servir des baleines dans les cantines scolaires pour pallier la pénurie. Ce n’est plus le cas aujourd’hui, et l’on constate même que la viande de baleine trouve de moins en moins preneur. Loin de soutenir la chasse, la population japonaise se montre d’ailleurs relativement indifférente à ce sujet.

Pourtant, « certains dirigeants estiment que cette « tradition ancestrale » fait partie de l’essence japonaise », explique Patrick Ramage. « Les agences de pêche, qui font partie du ministère de l’Agriculture, de l’Élevage et des Forêts, font également pression pour continuer à bénéficier des crédits des programmes de chasse. » Pour mettre fin à l’hécatombe, le Japon doit prendre conscience qu’une baleine vivante rapporte plus qu’une baleine morte et se lancer, comme de nombreux pays, dans des activités touristiques basées sur l’observation des cétacés (whale watching).

La bataille continue

Un an plus tard, les Japonais ont finalement décidé de poursuivre les tueries. Un nouveau programme a été mis en place, lequel fixe un quota de 333 baleines tuées par an. Cette nouvelle chasse « scientifique » devrait durer douze ans et permettre la capture de 3 996 cétacés présents dans leur refuge austral. Dès 2015, 333 baleines de Minke ont été sacrifiées sur « l’autel de la science ». Tokyo estime ainsi pouvoir collecter des données sur l’âge de la population baleinière, lesquelles sont nécessaires pour définir des quotas de pêche assurant la viabilité de l’espèce.

Au nom d’une meilleure compréhension des écosystèmes marins de l’Antarctique, le sanctuaire est une nouvelle fois violé. Révoltée par l’inaction du gouvernement australien face à la reprise de la pêche illégale et décidée à sauver les cétacés, la Sea Shepherd a de nouveau hissé son pavillon noir et traque les baleiniers à bord du Steve Irwin et de l’Ocean Warrior. Cependant, le Japon a désormais recours à la surveillance militaire et guette les mouvements des navires de l’ONG par satellite. Malgré ces nouveaux obstacles, les activistes poursuivent leur combat. « Nos efforts ont été comme des aiguilles d’acupuncture plantées dans la société japonaise », soutient Paul Watson. « Nous avons montré l’incroyable gaspillage d’argent, la corruption et la honte que ce commerce sale a portée sur tous les Japonais. Nos efforts se sont avérés tellement significatifs qu’un officier japonais a dit que le Japon avait deux ennemis – la Chine et la Sea Shepherd ! »

Réaffirmant sa volonté de lutter contre la chasse à la baleine jusqu’à ce qu’elle soit abolie pour toujours, le Capitaine Paul Watson affirme que « La Sea Shepherd est guidée par une réalité : si l’océan meurt, nous mourrons ! »

Alexandra Nicolas


¹ Le site Futura définit ainsi la résilience : « Se dit d’un organisme, d’une espèce ou d’un écosystème capable de résister et de surmonter des perturbations importantes (catastrophe naturelle, marée noire, etc.) pour retrouver un fonctionnement normal. »


Sources :

  • International Whaling Commission [en ligne]. URL : https://iwc.int/iwcmain-fr
  • Cour Internationale de Justice, « Communiquée de presse 2014/14 » [en ligne], publié le 31/03/2014, consulté le 28/01/2018. URL : http://www.icj-cij.org/files/case-related/148/18163.pdf
  • Le Monde Planète, GARRIC Audrey, « Chasse à la baleine : Une décision historique, avec des répercussions mondiales » [en ligne], publié le 31/03/2014, consulté le 28/01/2018. URL : http://www.lemonde.fr/planete/article/2014/03/31/chasse-a-la-baleine-une-decision-historique-avec-des-repercussions-mondiales_4393111_3244.html
  • Sea Shepherd Conservation Society, Captain Paul Watson: “The Whale Wars continue”, publié le 28/08/2017, consulté le 28/01/2018. URL : http://www.seashepherd.org/news-and-commentary/commentary/the-whale-wars-continue.html
  • Sciences et avenir, avec AFP, « 333 baleines tuées en toute impunité par le Japon » [en ligne], publié le 25/03/2016, consulté le 28/01/2018. URL : https://www.sciencesetavenir.fr/animaux/animaux-marins/333-baleines-tuees-en-toute-impunite-par-le-japon_103133
  • Futura Science, HAUG Andréa, « Les baleines atténueraient le changement climatique » [en ligne], publié le 16/07/2014, consulté le 28/01/2018. URL : https://www.futura-sciences.com/planete/actualites/zoologie-baleines-attenueraient-changement-climatique-54497/
  • 20 minutes. CHAUVET Audrey : « Le projet de sanctuaire pour les baleines en Atlantique sud rejeté par la Commission baleinière » [en ligne], publié le 03/07/2012, consulté le 28/01/2018. URL : http://www.20minutes.fr/planete/965219-20120703-projet-sanctuaire-baleines-atlantique-sud-rejete-commission-baleiniere

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