Nathalie Loiseau, tête de liste LREM pour les européennes, est-elle facho ? Poser la question c’est l’affirmer. La toile ne s’embarrasse plus de nuance. « Facho un jour, facho toujours », lancent certains. Nathalie Loiseau a cinquante-quatre ans. Elle est sommée de se justifier pour une élection lorsqu’elle était étudiante.
On pourrait attendre que baisse la marée numérique tant les déchets qu’elle charrie excellent en vacuité. Puis, au monde de la politique, c’est de bonne guerre. C’est futile, mais ça embarrasse l’adversaire, alors on y va. Mais cette tweetempête est effrayante à l’ère du numérique et de son infaillible mémoire. Comment en effet ne pas s’interroger aujourd’hui sur l’engagement de la jeunesse dans ce contexte ?
Si les choix d’aujourd’hui doivent valoir pour l’éternité, ça va devenir très compliqué. Combien de ceux qui concoctent aujourd’hui des décisions qui conduisent à la sélection dans les universités étaient dans la rue en 1986 contre la Loi Devaquet, lui reprochant précisément d’introduire… la sélection dans les universités ? Est-ce nécessairement signe d’un honteux reniement ? La vie n’est pas une trajectoire linéaire. François Mitterrand était-il pétainiste ou résistant ? Probablement les deux, à des moments différents de son parcours.
La polémique Loiseau exprime la volonté d’ériger en norme l’assignation à résidence intellectuelle. Vous avez été, vous devez le rester. Surtout ne bougez pas d’où vous êtes.
C’est l’histoire d’un antiraciste radical qui reproche à un candidat noir de prendre sur sa liste des « fachos ». Mais si le facho accepte de soutenir le Noir, c’est peut-être qu’il a changé. Ça devrait être une victoire pour les antiraciste. Eh ben, non !
Admettons que Madame Loiseau ait été une fasciste dangereuse à vingt ans. A travers ses actes et engagements d’adultes, elle n’a, nous semble-t-il, rien montré d’équivoque. Les anti-fascistes devraient s’en réjouir. Ça fait bien une facho de moins. Ils ne parviennent pas à s’en réjouir. Une sorte de réflexe de survie. Il faut bien des fascistes si l’on veut continuer à être contre. « Que deviendrions-nous si les fascistes se convertissaient à tolérance ? » Cette polémique est vide et dangereuse.
Constant Lekiby